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Entretien avec Professeur Justin N’goran KOFFI « Le récépissé d’entreposage garanti des prix rémunérateurs aux producteurs »

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1 – Monsieur le Directeur Général, expliquez-nous, brièvement, en quoi consiste le Récépissé d’entreposage ?

Avant de répondre à votre question, je tiens à préciser un point très important : nous sommes dans le domaine des matières premières brutes. Que ces matières premières soient minières ou agricoles, leur cours sur les marchés mondiaux, est très volatile, ce qui ne garantit pas des revenus réguliers et décents pour les producteurs. En même temps, la chaîne industrielle de la transformation n’est pas sûre de bénéficier d’un approvisionnement régulier.  Il faut donc prévoir, pour les producteurs une garantie de revenus, et pour les industries de transformation, une garantie d’approvisionnement. C’est le rôle du Récépissé d’entreposage d’offrir ces deux garanties.

Le « Récépissé d’entreposage » (RE) est un concept, comme vous pouvez l’analyser, composé du mot «récépissé » et du mot « entreposage ». Les cerner, isolément, permet d’appréhender, avec précision, la sémantique dudit concept.

Le récépissé est un document qui constate qu’un objet, une somme d’argent ou un stock a été reçu en communication ou en dépôt. Il y a donc, ici, en amont de la production du récépissé, un entreposage.

L’entreposage permet de réguler et d’optimiser le flux des marchandises pour une gestion des stocks efficace et une organisation du stockage des marchandises maîtrisée. On parle, aussi, de logistique d’entreposage qui intervient dans une supply chain.

Partant, le Récépissé d’entreposage, est un « Récépissé-warrant ». Autrement dit, c’est un titre qui représente les marchandises ou les matières premières déposées dans les magasins généraux ou les entrepôts, et qui peut être endossé par le déposant, selon une jurisprudence de 1971.

Au sens de la Loi n°2015-538 du 20 juillet 2015 portant réglementation du système de récépissés d’entreposage, le récépissé d’entreposage est « le document sous forme tangible ou électronique émis par un gestionnaire d’entrepôts comme preuve du dépôt dans un entrepôt donné, des marchandises spécifiées en quantités (poids, volume, nombre d’unités), et qualité. » J’ajoure « et traçabilité », une traçabilité de plus en plus importante avec l’augmentation des fraudes.

 

2 – Quel est son impact sur le développement de l’agriculture ivoirienne ?

Le récépissé d’entreposage s’inscrit dans un système. C’est le Système de Récépissé d’Entreposage (SRE) qui est identifié comme outil de facilitation à l’accès des prêts bancaires à court terme pour les acteurs des secteurs agricoles et agro-industriels. Voilà déjà un premier impact.

On peut encore citer comme impacts auxquels le RE aboutit:

– la garantie pour les unités de transformation agricole un approvisionnement continu en matière première tout au long de l’année ;

– l’assurance d’une bonne conservation des matières premières grâce à un stockage approprié dans des entrepôts agréés ;

– l’appui au développement de l’agriculture et de l’agro-industrie ;

– une réponse efficace à la problématique du financement de la production agricole et de la transformation locale des matières premières ;

– la sécurisation des financements par les banques ;

– la garantie des prix rémunérateurs aux producteurs

– la limitation des pertes post-récolte.

 

3 – Nous sommes dans une nouvelle année, quel bilan pouvez-vous faire de vos activités 2022 ?

 L’année 2022, dans les annales de l’Agence de Régulation des Récépissés d’Entreposage (ARRE), a été une bonne année, une belle année dont quelques chiffres sont les témoins des plus éloquents. C’est, par exemple :

– 1 264 038 kg de noix brutes de cajou entreposées (contre 355 071 kg en 2021) ;

– 33 Récépissés d’entreposages émis (contre 144 en 2021) ;

– 256 % d’évolution (contre  en 2021), etc.

À dire le vrai, le bilan 2022 de l’ARRE se consolide en trois grands points alimentés d’actifs qui en déclinent le contenu. Ce sont :

– la mise en place d’un système de contrôle des récépissés d’entreposage ;

– la régulation et le contrôle du système de récépissés d’entreposage ;

– la promotion et le développement du Système de Récépissés d’Entreposage (SRE).

Sur le premier point, on peut retenir que l’ARRE a tenu, dans sa vision de modernisation et d’offre de prestations efficaces, à actualiser le Registre Central, en toute légalité, c’est-à-dire dans le respect strict des textes en vigueur. Cela a permis l’enregistrement physique des récépissés émis et le traitement efficace des récépissés transmis. Les chiffres annoncés plus haut éclairent mon propos.

La vision de modernisation est, par ailleurs, perceptible dans l’opérationnalisation de la plateforme électronique de l’ARRE et dans l’actualisation du schéma directeur informatique du Registre Central. Cela permet, naturellement, un contrôle et une émission fiables des récépissés d’entreposage.  Et pour ne pas s’arrêter en si bon chemin, l’ARRE a étendu la plateforme électronique à d’autres marchandises éligibles notamment l’hévéa, le maïs sec, le riz paddy, le riz blanchi, la noix de cola et le cacao.

Sur le deuxième point, on note l’analyse de demandes d’agrément des acteurs SRE aux fonctions d’inspecteur d’entrepôts (IE) et de contrôleur de la qualité et du poids (CQP). Par ailleurs, le présent créneau de régulation et de contrôle du SRE, a le creuset fécond pour l’initiation d’une franche collaboration (qui produit des fruits appréciables) avec la Filière Hévéa, la Filière noix de cola fraîche et le Marché de Gros de Bouaké (MGB).Ici, aussi, l’ARRE peut se réjouir, des résultats obtenus lors de la campagne 2022, dont se satisfait, à en redemander, l’opérateur SCOOPS CANAAN, par exemple.  Et c’est dans ce contexte d’amélioration que l’ARRE a jugé bon d’élaborer des textes complémentaires pour rassurer, de façon optimale, le cadre juridique et réglementaire qui régit le SRE.

Sur le troisième point, on peut affirmer (et même confirmer), sans hésiter, que l’ARRE a conquis des espaces et susciter l’adhésion d’un nombre de plus en plus important de producteurs, d’industriels et de banques à sa politique et à sa vision. C’est un aboutissement heureux de la politique de promotion de l’ARRE. Pour ce faire, notre Agence a participé, entre autres, au Forum sur le Commerce et l’Investissement de Londres en octobre 2022 ; à la restitution de l’Etude de Rentabilité Economique et Financière des Opérations d’Entreposage dans le SRE.

Dans cet élan dynamique de l’ARRE, il faut signaler le projet de construction d’entrepôts modernes et de silos, et  le management de collaborations avec des opérateurs économiques et financiers. Ces projets et collaborations s’inscrivent dans les perspectives de l’ARRE de l’année 2023.

4 – Quelles sont les perspectives pour l’année 2023 ?

L’ARRE, vous l’aurez, sans doute, remarqué, est, dans mon entendement, comparable à ce monument qu’est l’homme debout qui harmonise toutes les dimensions de son être. Cela dit, l’ARRE programme bien des améliorations et des activités afin de consolider son fonctionnement et atteindre les objectifs que lui a fixés le Gouvernement, ce que formalise son cahier des charges. La vision, in fine, est d’assurer le revenu du producteur et d’améliorer ses conditions de vie. Au cours de l’année 2023, l’ARRE entend :

1°) concrétiser la possibilité d’émettre les récépissés d’entreposage des produits agricoles que sont l’hévéa, le maïs sec, le riz paddy, le riz blanchi, la noix de cola et le cacao, à partir de la plateforme électronique :

2°) mobiliser des financements en vue de la construction de 108 entrepôts modernes et de 60 silos :

3°) étendre l’émission des récépissés d’entreposage à d’autres produits agricoles et à des produits non agricoles ;

4°) animer des formations sur la SRE dans toutes ses composantes ;

5°) assurer la régulation du SRE, etc.

Je tiens à insister sur un point : l’ensemble des projets de l’ARRE pour l’année 2023  est consigné dans un plan d’actions qui restera lettre morte, si les moyens que la structure attend ne viennent pas, malgré toute la volonté dont font montre le Conseil d’administration, la Direction générale, les directions, les sous-directions et les services, et l’ensemble des personnels, toutes compétences solidaires.

Mais j’ose croire, car je suis optimiste par nature, que tout ira bien. Et c’est ce que je souhaite à tous et à chacun en cette année 2023. Il y a va de l’intérêt de l’agriculture ivoirienne et de la consolidation de sa résilience dans un secteur où nous sommes les premiers producteurs mondiaux. Bonne et heureuse année 2023.

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